Claudia Cardinale, si ce nom ne vous évoque rien, alors sachez que vous ne connaissez pas l’un des sex-symbols les plus emblématiques des années 60. Retour sur le parcours de cette femme hors du commun et de sa florissante carrière au sommet du septième art.
Claudia Cardinale est née le 15 avril 1938 en Tunisie et plus précisément à Tunis, la capitale du pays, encore à l’époque du protectorat Français. Venue au monde d’un père, François Cardinale, exerçant comme ingénieur technique dans les chemins de fer et d’une mère, Yolande Greco, qui aura trois autres enfants après elle. Ses frères, Bruno et Adrien, et sa soeur Blanche. À la maison, c’est le sicilien qui est couramment parlé, héritage de ses grands-parents originaires de la Sicile. C’est à l’école, et notamment au lycée Cambon, situé rue de Marseille, qu’elle apprend réellement le français. Contrairement à ce que beaucoup pense, elle n’apprendra l’italien qu’à l’âge adulte afin de décrocher des rôles demandant de parler couramment cette langue. Enfant, Claudia Cardinale est loin d’être destinée à la carrière et au statut qui l’attends à l’âge adulte. Peu intéressée par les robes et la danse, cette dernière est considérée à l’époque comme un garçon manqué. Elle admire néanmoins de grandes figures féminines comme Marlon Brando ou Brigitte Bardot.
Sa vie sera marquée par les langues étrangères, un viol à l’âge de 19 ans, la naissance de ses enfants Patrick Cristaldi et Claudia squitieri, ses mariages ainsi que sa consécration dans le monde du cinéma et ses prises de position philanthropes en faveur de plusieurs causes humanitaires. Votant une gauche progressiste (En 2014, elle soutiendra publiquement Anne Hidalgo en vue du scrutin pour la mairie de Paris), elle lutte tout particulièrement contre le sida, pour le droit des femmes et ainsi que celui des homosexuels. À ce propos, elle ne démentira pas tout de suite des rumeurs selon laquelle une relation avec Rock Hudson serait fausse pour protéger ce dernier dans le cinéma, un milieu où l’homosexualité n’était pas bien acceptée à cette époque. Pour toutes ses actions humanitaires, elle sera nommée Ambassadrice de Bonne Volonté en 1999 par l’UNESCO pour ses différents soutiens.
Claudia Cardinale : les débuts au cinéma
Elle commence par de petits rôles, guère intéressée par ce milieu. Son rêve ? Devenir institutrice. Alors lorsque la belle brune remporte un concours de beauté mit en oeuvre par l’Office Italien du Cinéma en 1955, son titre de « La plus belle Italienne de Tunis » lui ouvre des portes. Elle apparaitra cependant dans Les Annaux d’or, un court métrage de 18 minutes réalisé par René Vautier en 1958 et dont le scénario est signé Sassi Rjeb. Le film est présenter à Berlinale mais ne pousse pas la belle jeune femme à poursuivre dans cette voie. Cependant, à l’âge de 19 ans, elle est victime d’une agression sexuelle et tombe enceinte. Déclinant l’avortement, elle met au monde son premier enfant prénommé Patrick le 19 octobre 1958 à Londres, événement qui la poussera à se rapprocher du cinéma pour gagner suffisamment d’argent dans le but de l’élever. Plus tard, on lui conseillera de taire cette naissance en expliquant que son fils était en réalité son jeune frère, dans le but de ne pas affaiblir son ascension au cinéma. Son producteur Franco Cristaldi, qui lui a soufflé cette idée, fera disparaitre par la suite les nombreuses lettres envoyées par son agresseur qui souhaitera rencontrer l’enfant. Une requête qui restera sans réponse et qui sera, plus tard, tout aussi déclinée par Patrick.
Elle jouera alors dans Goha réalisé par Jacques Baratier puis dans L’étrangère à Rome et, enfin, Le Pigeon réalisé par Mario Monicelli où elle tient le rôle de Carmelina. Ce dernier rôle la fait connaitre et lance sa carrière. S’en suivra Vent du Sud (Enzo Provenzale, 1959), Meurtre à l’Italienne (Pietro Germi, 1959), Nous sommes tous coupables (Luigi Zampa, 1959), Hold-Up à la Milanaise (Nanni Loy, 1959), Les Noces Vénitiennes (Alberto Calvacanti, 1959) et enfin Entrée de Service (Ralph Thomas, 1959).
Les années 1960 : la confirmation de « C. C »
Les années 60 marque le début de la célébrité pour Claudia Cardinale. Cette dernière fait une entrée fracassante dans cette décennie et joue dans plus d’une trentaine de films en l’espace de quelques années. Malgré tout, son accent et sa voix emmène la majorité des réalisateurs à souhaiter qu’elle soit doublée dans les films où elle apparait.
En mai 1962, La Fille à la valise (Valerio Zurlini) sort sur les écrans et l’Italie tombe amoureuse de la jeune Claudia. Les Dauphins (Francesco Marselli, 1960), Rocco et ses frères (Luchino Visconti, 1960), Le Bel Antonio (Mauro Bolognini, 1960) et Austerlitz (Abel Gance, 1960) marqueront son entrée dans la décennie de façon fracassante. Rocco et ses Frères et Le Guépard lui permettront d’obtenir une place dans le coeur des français grâce à sa présence aux côtés du célèbre Alain Delon de même que pour son rôle de Venus, la compagne de Cartouche joué par Jean-Paul Belmondo dans le film éponyme Cartouche (Philippe de Broca, 1962) un succès commercial qui attirera plus de 3 millions de spectateurs dans les salles obscures de l’hexagone. Elle connaîtra également la gloire aux États-Unis un an plus tard, avec son rôle de Claudia dans Huit et demi, réalisé en 1963 par Federico Fellini. Ce dernier, narrant l’histoire d’un cinéaste qui s’évade dans des fantasmes du passé, est un succès critique international et est aujourd’hui considéré comme l’un des meilleurs film de tous les temps. L’année suivante, Henry Hathaway lui offre le rôle de Toni Alfredo dans le film américain Circus World et confirme son statut de star du cinéma. Le film remporte un Golden Globes et est à nouveau salué par la critique. Dans Il était une fois dans l’Ouest (Sergio Leone, 1968), Claudia confirme son statut en Europe grâce au succès retentissant du film qui se classe toujours aujourd’hui comme l’un des films les plus vus du cinéma français. Il se classe juste derrière Autant en Emporte le Vent de Victor Fleming. Le film est cependant un échec aux Etats-Unis, notamment à cause de nombreuses scènes coupées, box-office qui ne ternira pas la réputation de Chef d’oeuvre mondial. Il regagnera ses lettres de noblesses sur ce territoire avec le temps.
En 1966, Claudia épousera son producteur Franco Cristaldi au cours d’une cérémonie organisée sans qu’elle ne soit avertie. Franco adoptera son fils, Patrick, mais le mariage sera un échec et le divorce sera prononcé quelques années plus tard, en 1975. Jusqu’alors, elle aura tournée dans de nombreux autres films comme Comment réussir en amour sans se fatiguer (Alexander Mackendrick, 1967), La Mafia fait la loi (Damiano Damiani, 1968), Un couple pas Ordinaire (Francesco Maselli, 1968) ou encore Les Conspirateurs, La tente rouge et dans la comédie Certain, Probable et même Possible (Marcello Fondato) où elle jouera le rôle de Marta Chiaretti aux côtés de Catherine Spaak, Robert Hoffman et Nino Castelnuovo dans le rôle de Piero.
Les années 1970 : la consécration
Dans les années 1970, Claudia Cardinale est déjà une immense star du cinéma. Le monde entier la connait et elle a déjà tourner dans plusieurs oeuvres majeures du cinéma international. L’entrée dans les 70s la mènera naturellement à tourner dans des films de différentes langues, les trois qu’elle pratique le plus à savoir le Français, l’Italien et l’Anglais (États-Unis). Cette décennie s’ouvrira sur le film Les Aventures du Brigadier Gerard (Jerzy Skolimowsky), un tournage particulièrement éprouvant car le réalisateur, ne parlant pas bien anglais, manque de se faire renvoyer. Mais Claudia s’érige en barrage et menace de ne plus continuer le tournage sur Skolimowsku est mit à la porte. Il continuera le tournage mais sera évincé du montage malgré tout. Claudia poursuivra sa carrière dans L’Audience (Marco Ferreri, 1971), Popsy Pop (Jean Herman) ou encore La Scoumoune (José Giovanni, 1972), Liberté, mon amour ! où elle retrouvera Mauro Bolonigni en 1973, 13 ans après Le Bel Antonio (1960). C’est également l’année où elle rencontrera son deuxième mari, le réalisateur Pasquale Squitieri pour qui elle tournera dans le rôle de Lucia Esposito (Lucia et les Gouapes). C’est avec ce dernier qu’elle aura son deuxième et dernier enfant, une fille nommée Claudia, tout comme elle.
À la fin des années 70, Claudia Cardinale se lance – en parallèle – dans la musique grâce à deux titres qui graviront le Hit Parade grâce à leurs accents disco, le genre musical en vogue depuis quelques années déjà. Il s’agit du titre Love Affair en 1977 et Sun… I love you en 1978. Cette décennie se clôturera pas le tournage des films Bons baisers d’athènes du réalisateur George Cosmanos ainsi qu’avec son rôle de Francesca Modigliani dans le film français La Petite Fille en Velours Bleu (Alan Bridges, 1979). Le film italien Si salvi chi vuole de Roberto Faenza qui ouvrira pour elle les années 80.
Les années 80 : continuité d’une carrière florissante
Dans les années 80, Claudia Cardinale continue d’évoluer au cinéma. Elle tourne dans moins de film, ralentissant légèrement le rythme effréné qu’elle adopte depuis 20 ans déjà. En 1982, dont cette interview pour l’émission Spécial Cinéma, présenté par Christian Defaye à la télévision française. Cette dernière se confie sur les films qu’elle à tourner, ses pensées par rapport à ces derniers et, globalement, par sa carrière florissante dans le cinéma français et international.
La décennie sera marquée par des productions comme Fitzcarraldo, un film allemand de Werner Herzog qui fut en compétition pour la palme d’or 1982, Le Ruffian (José Giovanni, 1983), Henry IV, le roi fou de Marco Bellocchio en 1984 mais aussi par L’été prochain (Nadine Trintignant, 1985), Un homme amoureux (Diane Kurys, 1987) ou encore La révolution Française, Hiver 54, l’Abbé Pierre de Denis Amar et, enfin par Acte d’amour où elle interprète le rôle d’Elena en 1989. Ce dernier conte l’histoire d’une veuve devant élevé Martina et Sandro, ses enfants, avant d’apprendre la toxicomanie de son fils. Elle se battra alors pour le sauver des fléaux de la drogue. Ce film magistral lui permettra de remporter le Globe d’Or 1991 de la Meilleure Actrice face à Carla Benedetti et Nadia Rinaldi, la version italienne des Golden Globes.
Années 1990-2010 : films, théâtre et prises de position
Le ralentissement des tournages entamé dans les années 80 se poursuit, cette fois au profit du théâtre. Bien sûr, Claudia n’abandonne pas le cinéma et joue tout de même dans une dizaine de films, soit environs 1 par an. Ce sera le cas avec Mayrig (Henry Verneuil, 1991), Le fils de la panthère rose (Blake Edwards, 1993) ou encore Un été à la Goulette (Férid Boughedir, 1996) où elle interprète son propre rôle et Riches, Belles etc. de Bunny Godillot en 1997. Dans ce film de 87 minutes, elle prête ses traits à la baronne Mitsy aux côtés de Lola Naymak, Marissa Berenson et Anouk Aimé. Mais à partir des années 2000, elle joue également sur les planches, chose qui ne lui était pas forcément très attrayant jusque là. La Vénitienne en 2000, une pièce qu’elle jouera à Paris, Comme tu me veux de Luigi Pirandello en 2002, ainsi Doux Oiseaux de jeunesse (2005) et La ménagerie de verre (2006), toutes deux montées par l’écrivain et dramaturge américain Thomas Lanier Williams III, plus connu sous le nom de Tenessee Williams. En 2017, elle jouera également dans la pièce La Stranna Coppia de Neil Simon, une pièce jouée en Italie.
Durant plus de 30 ans, elle recevra de nombreux prix d’honneur à travers le monde et plus particulièrement en Italie où sa carrière continue d’être louée par les professionnels du cinéma. Le prix David Di Donatello en 1997 mais aussi le prix Flaiano en 1998, le ruban d’argent d’honneur, un Ours d’Or en 2002, un prix offert par le Viareggio EuropaCinema et également celui des Acteurs Européens. Ce dernier lui sera décerné lors du Festival du Film qui s’est tenu à Ludwisburg, une ville allemande située dans le Land du Bade-Wurtenberg. Elle remportera également le prix Henry-Langlois et surtout la légion d’honneur en 2008 de la main de Nicolas Sarkozy pour l’ensemble de sa carrière et son oeuvre dans le cinéma français. Elle sera également faite Chevalier grand-croix de l’Ordre du mérite de la République Italienne en 2016 et Grand cordon de l’Ordre National en Tunisie. Ces dernières récompenses sont probablement les plus marquantes parmi de nombreuses autres qu’elle continue de recevoir aujourd’hui en souvenir d’un apport considérable au cinéma international.
Ces années sont également marquées par ses prises de position en faveur des femmes, des homosexuels dont elle soutiendra le droit au mariage et sa participation à la lutte contre le sida qui amènera l’UNESCO à la nommer Ambassadrice de bonne volonté à la fin des années 90. Elle est également une partisante connue de la gauche française.
Surtout, Claudia Cardinale est une femme qu’on aime. Une femme que la rédaction du Valentine’s Pepper souhaitait mettre à l’honneur avec un portrait sur sa vie, à la fois inspirante et exceptionnelle. Nous ne pouvions citer l’ensemble des films de sa carrière, tant sa filmographie est conséquente, mais nous avons fait notre possible pour en retracer les lignes phares. Aujourd’hui, nous lui devons cette immense apport au cinéma, mais nous voulions également louer ses prises de positions qui n’ont fait que renforcer la sympathie que nous éprouvons à son égard. Une grande dame, de par l’esprit et par le coeur, ainsi qu’une immense actrice ayant traversée les générations. Inoubliable, voilà tout !